Avertissement

Leibnitz fut fasciné par la structure binaire du Yi King. En effet, le Yi-King repose entièrement sur deux concepts de base : le yin et le yang. Le yin, concept femelle et obscur, complémentaire, concurrent et antagonique du yang, mâle et lumineux.

Leur combinaison par groupes de trois permet d'obtenir 2*2*2=8 trigrammes. Ces trigrammes représentent des forces

La combinaison de ces huit symboles deux à deux permet d'obtenir 8*8=64 hexagrammes. Ces hexagrammes représentent des situations.

Un tirage du Yi-King est une méthode probabiliste permettant d'obtenir un oracle. Cet oracle se compose d'un hexagramme et, éventuellement, d'un deuxième hexagramme (dit de mutation) si une au moins des six lignes est instable.

Quand et pourquoi interroger l'oracle ?

Interroger le Yi King, c'est se tourner vers un vieillard de quatre mille ans. Un vieux radoteur, plein de bon sens ? Pas seulement. Il suffit de quelques tentatives pour se rendre compte que chaque tirage donne curieusement une réponse claire et concordante avec la question posée. Mieux, il répond bien souvent à cette facette de la question que nous n'osions pas exprimer consciemment. Dans la majorité des cas, on observera des coà¯ncidences frappantes entre la question posée et la réponse de l'oracle. N'hésitez pas à noter chaque tirage :

- qui a tiré, pour qui. Quelle était la question (si vous tirez pour quelqu'un d'autre, demandez lui de rédiger la question par écrit, c'est important, quand bien même il ne souhaite pas l'exprimer verbalement ou vous la faire connaître).

- après le tirage, notez encore : la réponse a-t-elle changé le questionneur, l'a-t-elle conforté ? A-t-il compris la réponse ? En est-il satisfait ? A-t-il mentionné une coà¯ncidence ?

Je me suis efforcé pendant des années à m'astreindre à cet exercice de façon systématique. Aujourd'hui, les statistiques portent sur un nombre suffisant de cas pour que je ne me sente plus contraint à cet effort (la moyenne théorique tend vers la moyenne empirique si N est grand).

Par la suite, j'indiquerai deux méthodes de tirage du Yi-King. Personnellement, ma préférence va clairement à l'achillée (des tiges de bambou sont également parfaites pour le rituel). Pourquoi l'achillée ? D'abord pour sa lenteur. Les tiges permettent de prendre le temps d'installer un rituel. Après tout, si la question a de l'importance, autant s'installer, se laisser pénétrer par la situation. Si un choix important se pose devant vous, préférez vous tirer à pile ou face ? Demander un conseil à un inconnu ? Ou bien vous asseoir paisiblement pour dialoguer avec un sage ?

La pratique du Yi-King est une initiation qui n'a d'autre maître que l'incroyable cohérence du texte, sa résonance avec les harmonies qui tissent le réel dans tous les niveaux de ses fibres. Depuis l'ordonnancement des galaxies jusqu'aux atomes. N'oubliez pas. Le Ciel, pur Yang est le premier hexagramme. La Terre, pur Yin le suit. L'humain est là : niveau entre les niveaux. Onde entre les ondes.

Alors quand interroger le maître ?

Pas seulement face à un choix ou un doute. Consultez-le pour les grandes occasions (mariage, déménagement, sentiment de mutation intérieure). Peu à peu, vous sentirez combien il est bénéfique de posséder dans sa famille un tel ancêtre.

Les dangers du tirage

Je dois mettre en garde l'apprenti. Quand bien même le texte ne dispense aucune sentence troublante comme le peuvent être celles des bonimenteurs du tarot, toute expérience sensible est dangereuse. Le plus grand danger, c'est de ne rien tirer de cette sagesse millénaire. Cela arrive aux personnes qui attendent trop de l'Oracle. Celles qui veulent l'entendre dire ce qu'elles veulent entendre. La méthode que je vais décrire permet de traduire l'Oracle. Il ne s'agit pas de paraboles mais bien de descriptions des forces à l'œuvre. L'erreur d'interprétation guette celui qui associera une force à une autre.

Pour bien comprendre le message de l'Oracle, il faut être capable de se vider. Il faut laisser son cœur se désemplir. Malheureusement, Confucius a davantage marqué le texte que Lao Tseu. Bien que l'ésotérisme soit présent dans leurs doctrines respectives, Lao Tseu est plus proche de la voie de l'initiation. La préférence pour l'apprentissage oral, pour la compréhension est à mon avis plus compatible avec l'esprit du Yi King que la philosophie confucianiste. Celle-ci est plus moralisatrice, intellectuelle. Trop Yang !